Une constitution, c’est un cadre légal et politique qui régit la dynamique entre une nation et ses gouvernants de même que l’organisation et le fonctionnement des pouvoirs publics. Elle regroupe habituellement une ou plusieurs lois importantes et d’autres sources écrites ou non écrites qui relèvent des usages. Elle est considérée comme la première source du droit.
Elle définit les principales institutions politiques et juridiques d’un État. Pour le Canada, ce sont la Chambre des communes, le Sénat, la Cour suprême et les parlements des provinces, comme l’Assemblée nationale du Québec.
Elle précise aussi le processus d’adoption et d’application des lois, garantit les droits et libertés, limite le pouvoir de l’État, s’assure du partage des pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire et affirme la légitimité de l’État1.
Une constitution peut se composer d’un seul ou de plusieurs textes. C’est le cas pour la Constitution du Canada. Elle peut aussi, comme au Royaume-Uni, relever de la coutume, c’est-à-dire de règles non écrites développées au fil des années conformément aux usages et à la pratique.
Une constitution n’est pas une loi comme les autres : c'est la « loi des lois ». Une fois adoptée, elle peut être modifiée seulement en respectant les conditions mentionnées dans son propre texte. Ce mécanisme s’appelle une « formule d’amendement » et la différencie de toutes les autres lois.
En effet, ces dernières n’ont pas cette caractéristique : elles peuvent donc être modifiées par un Parlement quand bon lui semble2.
La Constitution du Canada étant la « loi suprême du Canada », elle prédomine sur l’ensemble des lois adoptées par les deux ordres de gouvernement du pays : fédéral et provincial.
Depuis la Conquête britannique de la Nouvelle-France en 1760, la population et le territoire du Québec contemporain ont été régis par 6 constitutions successives. Les 5 premières constitutions sont adoptées par le Parlement de Londres puisque le Canada est alors une possession britannique. Ce Parlement donc est le seul à pouvoir modifier ces constitutions si, par exemple, les dirigeants canadiens lui en font la demande.
1763 ─ La Proclamation royale qui prévoit notamment la création de la Province de Québec, dont les frontières se limitent aux terres colonisées de la vallée du Saint-Laurent et de la rive nord de la baie des Chaleurs.
1774 ─ L’Acte de Québec qui révoque la Proclamation royale, agrandit le territoire de la Province de Québec, rétablit le droit civil français et le régime seigneurial.
1791 ─ L’Acte constitutionnel qui divise la colonie en Haut et Bas-Canada et prévoit une assemblée législative pour chacune de ces entités.
1840 ─ L’Acte d’Union qui crée la province du Canada, le « Canada-Uni ».
1867 ─ L’Acte de l’Amérique du Nord britannique (A. A. N. B.) qui crée le Canada fédéré.
La 6e et dernière Constitution du Canada est entrée en vigueur en 1982. Elle est différente des précédentes.
En effet, la Loi constitutionnelle de 1982 est adoptée par le Parlement du Canada – et non par le Parlement de Londres - et elle prévoit un mécanisme d’amendement contrôlé uniquement par le Canada.
Cette mesure coupe définitivement les liens avec la Grande-Bretagne. Le 17 avril 1982, la reine Élisabeth II a sanctionné symboliquement cette loi pour concrétiser la dernière étape de l’affranchissement de son ancienne colonie. C’est pour cette raison que l’on dit que « la constitution a été rapatriée », autrement dit, ramenée au Canada3.
Avant que la Loi constitutionnelle de 1982 ne soit adoptée, c’est la Loi constitutionnelle de 1867 (A. A. N. B.) qui était en vigueur.
Elle a servi de base de négociations entre les gouvernements des provinces canadiennes et le gouvernement fédéral pour définir la future constitution.
Au cours des négociations, le gouvernement du Québec a exprimé son désaccord face à l’entente qui a mené à l’adoption de la Loi constitutionnelle de 1982. Depuis, aucun premier ministre québécois n’a accepté de signer et de reconnaître cette constitution qui est quand même en vigueur au Canada et au Québec.
Le Canada étant une ancienne colonie britannique, sa constitution est modelée sur celle du Royaume-Uni. Elle met en place une monarchie constitutionnelle qui désigne comme chef d’État la reine du Canada, Élisabeth II.
Cette dernière est représentée par un gouverneur général au fédéral et par des lieutenants-gouverneurs dans les provinces4. Ces représentants de la Couronne britannique partagent le pouvoir exécutif avec le premier ministre, mais leur rôle est symbolique. C’est le premier ministre qui détient le réel pouvoir de décision.
La Loi constitutionnelle de 1982 confirme ce qui a été établi par la Loi constitutionnelle de 1867.
À l’époque, les colonies qui s’unissent (Canada-Uni, Nouveau-Brunswick, Nouvelle-Écosse) deviennent les provinces d’une nouvelle entité : le Canada fédéré.
Ces provinces créent deux paliers de gouvernement ayant des pouvoirs différents : le provincial et le fédéral.
Ces provinces mettent en place leurs parlements respectifs pour garantir la protection de leurs particularités : instruction publique, lois civiles, langue, affaires municipales, etc.
Au-dessus du palier provincial, un gouvernement fédéral est créé. Il est doté de compétences que les provinces ont accepté de mettre en commun : douanes, commerce extérieur, monnaie, voies maritimes et transport interprovincial, défense et politique extérieure, etc.
Rappelons que ces provinces, dont l’existence est reconnue par les constitutions antérieures, cèdent volontairement ces pouvoirs à l’autorité fédérale nouvellement créée.
Le Parlement fédéral siège à Ottawa. Il est formé de deux Chambres : la Chambre des communes (où les membres sont élus) et le Sénat (où les membres sont nommés). Le Parlement fédéral légifère dans les domaines désignés par la constitution.
Évidemment, le partage des compétences entre le fédéral et le provincial a été conçu pour répondre au contexte et aux besoins de l’époque.
Or, avec l’évolution politique, économique et sociale de l’État, le partage de ces compétences peut occasionner des tensions entre les deux instances, leurs intérêts étant parfois divergents, entre autres parce que certaines compétences sont partagées par les deux paliers de gouvernement : agriculture, immigration, pêche, justice, etc.
Mentionnons aussi qu’à l’origine, le fédéral détenait le pouvoir de désaveu, ce qui signifie qu’il pouvait annuler, une loi provinciale5. Ce pouvoir n’est plus utilisé aujourd’hui.
Il n’y a pas de Constitution québécoise rédigée sous forme de document écrit.
Cependant, il existe plusieurs éléments du droit coutumier et un ensemble de textes de lois qui précisent l’organisation politique, de conventions constitutionnelles héritées de la tradition britannique, de coutumes et de décisions judiciaires, etc. Ces documents ne font l’objet d’aucune liste officielle.
L’idée de doter le Québec d’une constitution remonte à 1858 : Joseph-Charles Taché, journaliste et député de Rimouski, proposait alors que chaque État de la future fédération canadienne puisse adopter sa propre constitution écrite6.
Après 1867, les relations entre les gouvernements fédéral et provincial sont un élément majeur de l’histoire du Québec et du Canada.
1 Michel Bonsaint (dir.), La procédure parlementaire du Québec, 3e éd., Québec, Assemblée nationale du Québec, 2012, p. 53.
2 Henri Brun et al., Droit constitutionnel, 4e éd., Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2012, p. 10-11.
3 Ibid., p. 12-13.
4 Ibid., p. 10.
5 Frédéric Lemieux, Christian Blais et Pierre Hamelin, L’histoire du Québec à travers ses lieutenants-gouverneurs, Québec, Publications du Québec, 2005, p. 43-47.
6 Marc Chevrier, « Constitution québécoise », Encyclopédie de l’Agora, http://agora.qc.ca/
7 M. Bonsaint (dir.), op. cit., p. 53-54.